Le réel est souvent difficile à affronter. L’ego a souvent tendance à le compliquer pour contrôler ce qu’il perçoit comme une menace. Au lieu de nous véhiculer avec légèreté à travers la vie avec une pleine conscience, nous traînons de lourds concepts qui ralentissent notre mouvement et deviennent des boulets. Nous devenons imperméables à l’inattendu, aux changements de direction, à l’imprévisible. Les anglophones utilisent une expression qui décrit bien ce phénomène : one mind track. C’est suivre les rails sans pouvoir en dévier.
Je veux faire l’éloge de la dispersion, du détournement et de l’inachèvement. Souvent, en improvisant dans la création de mes œuvres plastiques, je fais une erreur. Cependant, en répétant celle-ci, j’en fais une tehnique qui m’appartient. Autrement dit, je gère mes erreurs au lieu d’en avoir peur. Pourquoi est-ce si différent dans le fonctionnement de la conscience ? L’engrenage de l’ego semble bloquer l’improvisation. Errer, c’est être prêt à accueillir le hasard en prenant le risque de s’égarer. De même, lorsque j’écris de la poésie, je pige dans la langue française comme dans une source de sons, en toute liberté, pour en faire des chants qui me parlent.